P152 – Le pouvoir de mobilisation des ondes et des images, de la colonisation tardive aux premières décennies des indépendances ( CRG African History Panel)
10 July, 16:00 – 17:30

Convenor(s)
Nativel Didier / LAM, CNRS
Goerg Odile / CESSMA, Université Paris 7 Paris Diderot

Abstract

Les sociétés et les pouvoirs utilisent divers moyens pour communiquer, exprimer leurs valeurs ou se mettre en scène : la danse, le chant, les parades, les cérémonies rituelles…. Au temps de la colonisation tardive et à l’aube des indépendances, les changements technologiques révolutionnent les modalités selon lesquelles ces expressions culturelles et prises de position politiques peuvent être diffusées dans une aire élargie, dépassant la communauté initialement visée, décuplant ainsi leur capacité de mobilisation mais aussi conservées dans le temps et archivées. Cet atelier souhaite interroger les enjeux auxquels renvoie la mobilisation des consciences par les médias depuis l’époque coloniale. De quelle manière ont-ils été investis ? Dans quelle mesure le développement de la radio, de la télévision et de la presse ont-ils stimulé une plus large circulation des idées ?

Mobilizing Power of Images and Waves, From Late Colonialism to the First Decades of Independence

Societies and political powers resort to different means to communicate, affirm their values or stage themselves: dance, songs, ritual ceremonies… In the 1950s, during late colonialism, and subsequently, during the first decades of independence, technology changed the ways these cultural expressions and political opinions could be circulated in a wider area, reaching a much broader audience than the one initially concerned, therefore extending its mobilization power. The changing technologies also make possible the preservation of these cultural expressions. This panel proposes to address the ways in which different media, since the colonial period, have served to mobilize public awareness. How precisely did the development of radio, television, and the press foster the wider circulation of ideas?

Paper 1

Nativel Didier / LAM, CNRS

La « guerre des ondes » a-t-elle eu lieu ? Arme radiophonique et contrôle des consciences, entre autorités portugaises et nationalistes mozambicains (années 1960-1975).

Les autorités coloniales, l’armée, la police politique portugaise utilisèrent tous les moyens radiophoniques disponibles dans la colonie pour mener à bien une guerre psychologique contre le FRELIMO (Front de libération du Mozambique) à partir de 1964. Mais dans le même temps, les nationalistes mozambicains disposaient eux-mêmes d’un accès direct aux ondes depuis la Tanzanie sans compter le soutien de médias occidentaux, d’Europe de l’Est et de divers pays africains. Cette communication vise à s’interroger sur les modalités et l’impact de ces stratégies concurrentes.

Paper 2

Diawara Mamadou / Université de Francfort

« Lorsque le Mali refuse, à mon tour je dis non ! » Médiation et voix de l’histoire à travers l’Afrique de l’ouest

Cette phrase, cri de ralliement des défenseurs de l’indépendance de la république du Mali, est le refrain d’un des premiers chants de Banzoumana Cissoko, le « Vieux Lion ». L’homme, devenu le griot titulaire du premier président du Mali, marque son refus de la servitude coloniale. Il le proclame à la radio. Dorénavant, il devient animateur d’un média moderne, dont la technologie lui échappe. Aveugle de surcroît. La présente communication thématise le concept de la médiation, ensuite l’affrontement entre les deux genres que sont l’Homme en tant que média (diseurs de tout bord) et le média mû par la technologie moderne (radio, télévision). Comme cette dernière est servie à son tour par l’humain (technicien de son, journaliste, réalisateur), j’analyse le rapport de force qui se créée entre les deux. Des exemples, pris notamment du monde Mande, à l’épreuve des radios dès la fin des années cinquante et de la télévision à partir du milieu de 1980, illustrent ces propos.

Paper 3

Martineau Jean-Luc / CESSMA, INALCO

La première télévision d’Afrique subsaharienne au service de la mobilisation ethno-politique des Yoruba en 1959

En 1959, le gouvernement du Western Nigeria au Nigeria lançait WNTV et, quelques mois plus tard, WNBS depuis ses locaux d’Ibadan. Dès 1954, la volonté de doter l’exécutif régional, très engagé sur la voie de la revendication de l’indépendance, d’un moyen de contourner la radio contrôlée par le pouvoir colonial avait été très clairement énoncée. Cependant, très vite, ce n’est pas seulement de cela qu’il s’est agi.
L’équipe yoruba qui créa la télévision poursuivait un but identitaire autant que politique ; il s’agissait de faire de cette chaîne unique une vitrine des réussites technologiques, artistiques et culturelles des Yoruba, de leur fournir un support quand ils étaient créateurs, écrivains ou gens de théâtre, de leur fournir un miroir de manière à leur donner collectivement le sentiment de constituer une nation. Ce qui fut singulier c’est que la prouesse technique du gouvernement yoruba importait autant voire plus que le contenu diffusé. Bien qu’elle diffuse des westerns sans rapport avec l’identité yoruba, WNTV allait incarner pour longtemps une identité yoruba se projetant pour elle-même et pour les autres.

Paper 4

Kiriakou Héloïse / IMAF

Pighin Aline / CESSMA

Du nous africain au nous congolais. Littératures et plasticités à la fabrique d’une identité politique et culturelle dans la presse du Congo-Brazzaville, 1950-1970

Dire que la presse mobilise dans ses colonnes un certain art populaire à des fins politiques relève aujourd’hui de la tautologie. La poésie, le feuilleton, la bande-dessinée, l’illustration et leurs détournements sont autant d’outils de promotion et de critique du pouvoir. Cet usage est souvent perçu en contexte africain comme un phénomène très contemporain et post-indépendant.
Pourtant, si la professionnalisation de ses contributeurs est récente, l’usage de la culture au service du politique est à replacer dans la longue durée, et trouve son point d’ancrage dès les années 1950, au moment où une élite africaine restreinte fait l’apprentissage de l’objet imprimé et s’affranchit progressivement des modèles occidentaux. Littératures et arts plastiques sont les moyens de promotion d’une identité, africaine puis nationale, et constituent le terreau des communautés imaginées en devenir. L’analyse, centrée sur le Congo-Brazzaville, met en évidence les moteurs de l’apparition de rubriques et de revues dédiées ou faisant l’usage des arts à des fins politiques et à l’impact populaire et officiel de tels messages. Il s’agira de mettre en avant la période 1950-1970 comme charnière, laboratoire d’une certaine modernité du Congo contemporain, au prisme des contenus éditoriaux dont la lecture est nécessairement multiscalaire – d’abord très connectée au panafricanisme continental, puis recentrée sur la géographie du bassin congolais, et sur les seules frontières nationales.

Paper 5

Goerg Odile / CESSMA, Université Paris 7

L’impact des images : entre westerns, films arabes et films indiens, karaté …

Par la multiplication des genres (westerns, films arabes, films indiens, karaté, telenovelas…), le cinéma diffuse des images d’un monde autre qui bouleverse, pour des catégories précises de spectateurs (jeunes, hommes ou femmes …) les représentations et influence les façons d’être ou de faire. Ma contribution explore certains aspects de l’impact de la circulation filmique.

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