P068 – Analyzing the Cause(s) of Crises in Madagascar
9 July, 09:00 – 10:30

Convenor(s)
Roubaud François / IRD DIAL

Abstract

The panel aims to illuminate the nature and origin of Madagascar’s recurring crises. Invariably, for each crisis, events leading to a regime’s fall appear to be caused by cooperation games between groups, notably the elites, and by the regime’s gradual loss of popular support. The importance the Malagasy population gives to their economic conditions and to governance issues is highlighted by the context and motives of various crises. This overlap between economics and politics must be taken into account to understand Madagascar’s course and repeated crises. The events of 2008 and today’s so-called transition period, prior to the investiture of a new president, have already been studied (Galibert, 2009; Randrianja, 2012). However, such analyses could be further enriched by examining the diversity of groups and roles of various actors – the Churches, army, private sector, international community, civil society and the public – as well as the diversity and series of events that have generated and prolonged this transition.

Analyser les causes de(s) crise(s) à Madagascar
Le panel apportera un éclairage sur la nature et l’origine des crises récurrentes à Madagascar. Invariablement, pour chaque crise, les événements qui conduisirent à la chute des régimes en place apparaissent à la fois comme le résultat de jeux de coalition entre groupes d’acteurs, et notamment entre les élites, que celui de la perte progressive d’assise populaire du régime. Les contextes et motifs des différentes crises mettent en exergue l’importance accordée par la population aussi bien à leurs conditions économiques qu’aux questions de gouvernance. Comprendre la trajectoire malgache et ses crises à répétition implique de prendre en compte l’imbrication entre le politique et l’économique. Les événements de 2008 et la période actuelle dite de transition (avant l’investiture d’un nouveau Président) ont déjà fait l’objet d’études (Galibert, 2009 ; Randrianja, 2012). Toutefois, la diversité des groupes et du rôle des acteurs (les Eglises, l’armée, le secteur privé, la communauté internationale, la société civile, les populations) tout comme la multiplicité et l’enchaînement des faits qui ont généré et prolongé cette transition, constituent autant de matières pour enrichir les analyses.

 

Paper 1

Fremigacci Jean / IMAF

Les fondements socio-culturels de la crise de Madagascar

En un demi-siècle d’indépendance, Madagascar a usé trois républiques et la quatrième est mal partie.Pour rendre compte d’une telle récurrence des crises de gouvernance, il faut dépasser le niveau de la conjoncture, politique ou économique, et dégager la contradiction entre un modèle politique importé et les valeurs religieuses qui imprègnent tous les aspects de la vie du pays. La référence à Dieu et aux ancêtres a déterminé un contrat social qui privilégie le groupe de solidarité concrète et une idéologie de la parenté, et qui laisse ainsi peu de place au libre choix individuel. Cette base culturelle a constitué un terrain propice à des pouvoirs aux formes historiquement changeantes, mais toujours oligarchiques et prédateurs. Le fossé entre eux et le peuple les rend en réalité assez faibles et impuissants, mais ils peuvent tirer parti de la manipulation des valeurs traditionnelles et des blocages d’une société civile morcelée en “sociétés géographiques” de dimensions restreintes menacées par le tribalisme et l’ethnisme. La crise aiguë survient quand l’oligarchie du moment perd sa cohésion, se déchire et crée les conditions pour qu’un mouvement populaire balaie le pouvoir en place. Mais Madagascar n’a pas grand-chose à attendre d’un simple changement de l’équipe au pouvoir et ne sortira de sa crise structurelle qu’à la suite d’un changement social et culturel qui ne peut se situer que dans le temps long.

Paper 2

Lavrard-Meyer Cécile / Sciences-Po

Politique politicienne et crises malgache : l’enjeu des ego

Cette contribution se propose d’analyser les déterminants individuels, au sommet de l’Etat, des crises politiques malgaches depuis l’indépendance. Elle passera en revue les responsabilités des dirigeants dans les différentes crises politiques depuis 1972 (crise de 1972, de 1975, de 1991, de 1996, de 2002 et de 2009), en s’appuyant sur les archives ouvertes pour les périodes les plus anciennes ainsi que sur des témoignages inédits d’anciens chefs d’Etat malgaches pour la période la plus récente. Elle mettra en évidence le rôle des ego, des ambitions personnelles et des rivalités ethniques et de castes dans les crises politiques qui ont secoué Madagascar depuis son indépendance.

Paper 3

Razafindrabe Tsiory, Université Paris-Est Marne-la-Vallée

Etat de droit et état d’exception à Madagascar : Analyse politico-constitutionnelle des crises

Il s’agira  d’analyser la pratique de l’état d’exception, à travers l’histoire constitutionnelle de Madagascar depuis l’indépendance.
Ainsi, il convient de contextualiser les concepts fondamentaux, comme l’ « Etat de droit », la « Constitution » ou encore l’ « état d’exception », tel qu’ils trouvent leur application à Madagascar. On constatera que l’état d’exception, à Madagascar, est toujours proclamé à la suite d’un différend à caractère politique visant la conquête du pouvoir. Cette analyse confirmera l’existence d’un caractère indéniablement politique du droit constitutionnel dans ses interprétations et ses applications. On observera également que la majorité de la population se trouve écartée du jeu-politico-constitutionnel.
Au fil des constitutions successives, et des nombreuses révisions constitutionnelles, on a pu constater un renforcement de l’institution présidentielle, notamment par l’élargissement de leurs « pouvoirs de crise ». Une typologie sur l’usage (modéré ou débridé) des dispositions exceptionnelles peut alors être avancée.

Paper 4

Rakotomanana Faly / Institut national de la statistique (INSTAT)

Crises politiques à Madagascar : La majorité rurale a-t-elle subi la loi de la minorité urbaine ?

Depuis son indépendance, Madagascar a connu des crises périodiques qui ont fait chuté les régimes en place : en 1972, en 1991, en 2001 et en 2009. Les revendications initiales, même si elles étaient différentes d’une crise à l’autre tournaient autour de la question de gouvernance et concernaient l’ensemble de la population aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain. Le point commun de toutes ces crises était que les manifestations populaires se sont déroulées essentiellement en milieu urbain et en particulier dans la capitale. Les explications souvent évoquées sont principalement la forte concentration des faiseurs d’opinions en milieu urbain, le niveau d’éducation relativement élevé des urbains et le niveau d’accès aux informations. L’extension des mouvements au niveau de la population rurale était de faible ampleur, alors qu’en termes de nombre de voix, elle représente 80% de l’ensemble de la population. Les ruraux ont-ils épousé les revendications exprimées publiquement par les urbains ? Existe-t-il des décalages de point de vue entre la population rurale et la population urbaine en matière de gouvernance ou de gestion des affaires publiques ? Cette étude tente de faire une analyse comparative des évolutions des opinions des citoyens urbains et ruraux sur les différents aspects de la gouvernance à Madagascar entre 2005 et 2012. Elle se base sur des résultats empiriques issus de la série d’enquêtes « Afrobaromètre » réalisées à Madagascar en 2005, 2008 et 2012.

Paper 5

Wachsberger Jean-Michel / UMR DIAL

Razafindrakoto Mireille & RoubaudFrançois / UMR DIAL, IRD, Université Paris-Dauphine

Madagascar. L’île mystérieuse

Les théories classiques et récentes du développement sont impuissantes à expliquer la contre-performance économique malgache sur longue période. Cet article propose une relecture de l’histoire en mobilisant le cadre d’analyse de l’économie politique. Nos analyses pointent qu’en dépit de facteurs de blocage profonds, Madagascar a fait montre d’une capacité de transformation d’une modernité inattendue : transitions économique (avec l’arrivée d’une classe d’entrepreneurs nouveaux) et politique (avec les alternances démocratiques) ; mise en place d’institutions caractéristiques des sociétés « modernes » ; contrôle de la violence ; expression des aspirations économiques et citoyennes de la population. Trois entraves structurelles s’opposent en revanche au développement du pays : la fragmentation de la société, l’atomisation de la population et l’atrophie des corps intermédiaires favorisent une forte concentration du pouvoir aux mains d’une poignée d’élites qui n’est pas contrainte à avoir une vision de long terme et à prendre en compte les intérêts de la majorité ; la population reste tiraillée entre des revendications citoyennes de type démocratique et méritocratique et des valeurs traditionnelles qui imposent le respect de hiérarchies réelles et symboliques héritées du passé ; enfin, les politiques promues par les bailleurs de fonds, si elles ont pu avoir des effets positifs, ont également eu un impact négatif majeur sur la capacité de l’Etat à réguler la société.

← Back to list